A Draguignan, dans le Var, la mémoire de Clemenceau est honorée par un monument inauguré en 1954.

Marcel Wormser

Président de la Société des Amis de Georges Clemenceau

 

Si Clemenceau est profondément lié à la Vendée, territoire où il a grandi et où il a passé sa retraite pendant les beaux jours, il est également politiquement lié au Haut-Var, dans le Sud, où il fut élu député à deux reprises, à Draguignan, en 1885 et 1889. Malgré de nombreux soutiens, le Tigre, jugé trop parisien et corrompu, échouera à se faire réélire en 1893, cible d’une vaste campagne calomnieuse portée par de nombreux journaux locaux, dont L’anti-Clemenciste.

Une dizaine d’année plus tard, après l’affaire Dreyfus pendant laquelle s’est illustrée Clemenceau avec de nombreux articles, Clemenceau est de nouveau sollicité par des élus varois pour succéder au sénateur Denormandie. Elu, Clemenceau porte la revendication des ouvriers de l’arsenal de Toulon sur la journée de huit heures devant le Sénat, revendication décrétée en janvier 1903. Mais c’est en 1906, alors qu’il est devenu Ministre de l’Intérieur, que la popularité du Tigre dans le Var atteint son apogée, manifestée notamment lors d’une tournée triomphale entre le 14 et le 17 octobre. L’année suivante cependant, la révolte des vignerons entame fortement la popularité de Clemenceau et de ses partisans. ; le Var, plus socialiste et moins radical, s’éloigne de lui.

Le monument de Draguignan, une réalisation de la Société des Amis de Georges Clemenceau 

Lorsqu’en janvier 2018, à Draguignan, Christophe Castaner, Secrétaire d’État auprès du Premier Ministre, dépose une gerbe – à l’instar du Général de Gaulle en 1961 –, devant l’un des rares monuments élevés en l’honneur de Clemenceau, il découvre une bien étrange construction : un petit buste perché sur un haut socle au-devant d’un mur élevé en gradins formant un demi-cercle.

L’histoire de cet hommage voulu par les anciens électeurs du Député et du Sénateur du Var mérite d’autant plus d’être connue que ce fut, en 1954, une réalisation de la Société des Amis de Georges Clemenceau.

Tout commence le 23 décembre 1949 lorsque Georges Lecomte[1], ami de longue date de Clemenceau, Président de la Société des Amis de Georges Clemenceau, annonce qu’il a obtenu de Paul Léon[2], alors Président du Conseil d’Administration du Musée Rodin, une fonte, par ce dernier, du buste de Clemenceau entrepris par Rodin en 1911.

Le fondeur ayant renoncé à toute rémunération, le buste de Clemenceau par Rodin était obtenu gracieusement par la Société des Amis de Georges Clemenceau qui, ainsi, eut la certitude que satisfaction pouvait être donnée à la Municipalité de Draguignan et à Monsieur Varenne, ancien Préfet du Var.

Il s’ensuivit maintes difficultés pour déterminer le choix du buste, son transport, l’emplacement du monument, la nature du socle et le financement.

L’unanimité régna au sein de la Société des Amis de Georges Clemenceau sur le buste proposé (VI) et le transport à ses frais, tandis que sur l’emplacement, il fut décidé que le buste serait érigé, avec l’approbation de la municipalité, au milieu du pan coupé du square Aristide Briand donnant sur le Boulevard Georges Clemenceau, étant entendu que la grille serait déplacée de manière à ce que le monument soit à l’extérieur du square. D’autre part, les plaques portant le nom d’Aristide Briand seraient enlevées du pan coupé et soustraites à la perspective du monument.

Il fut convenu en outre que, le buste parvenu à Draguignan, un projet de socle serait étudié par les soins de la municipalité avec le concours de l’architecte de la ville et qu’un croquis coté de ce projet comprenant le socle surmonté du buste serait soumis à l’approbation de la Société des Amis de Georges Clemenceau qui acquiesça.

Un « comité de propagande » destiné à ouvrir une souscription est alors constitué sous la présidence d’honneur du Préfet Ottaviani. Une subvention de 60.000 francs environ ayant déjà été votée par la municipalité et Monsieur Nicolas Piétri ayant offert 200.000 francs, les travaux sont entrepris.

Une inauguration officielle en présence de Gaston Monnerville, président du Conseil de la République

Finalement, cinq ans après l’annonce de Georges Lecomte, le monument est inauguré le 14 novembre 1954 par Jacques Moreau, Vice-Président de la Société des Amis de Georges Clemenceau, en présence de Monsieur Monnerville, Président du Conseil de la République, et des autorités locales.

Ce fut après diverses polémiques : Michel Clemenceau aurait préféré le buste de Sicard, son père n’ayant pas aimé le travail de Rodin ; un square Aristide Briand ne pouvait abriter un hommage à Georges Clemenceau ; les Varois se voulaient prodigues en inscriptions, la Société avare.

Finalement, la sobriété triompha : outre le nom de Georges Clemenceau et ses dates de vie, « Artisan de la Victoire de 1918 » à droite, « Député Sénateur du Var » à gauche.

L’hommage de Jacques Moreau à Clemenceau prononcé en ce lieu et ce jour-là fut d’une rare qualité. C’est pourquoi nous le publions en complément de cet article.

 

[1]  Secrétaire perpétuel de l’Académie Française, auteur d’une biographie de Clemenceau dès 1918,

[2]  Ancien directeur des Beaux-Arts, avec lequel Georges Clemenceau avait installé Les Nymphéas à l’Orangerie.

A lire : L’hommage de Jacques Moreau à Clemenceau

 

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